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Le château de Cordès en 6 anecdotes : Le Nôtre et ses jardins, Sting en docteur Frankenstein !

Quand : 1512 - 1985

Le château | Calips / CC-BY-SA
Château Château de Cordés

1 - L'exécution du seigneur de Cordès

Premiers seigneurs de Cordés, au 13e siècle, les Chalus entreprennent la reconstruction de leur château au 15e siècle, sur des bases plus anciennes.

En attendant, Gilbert de Châlus, qui en 1659, devait vendre le château aux d’Alègre, connaît une fin… oups, peu enviable !

Entre 1665 et 1666, le roi Louis XIV fait tenir les Grands Jours d’Auvergne : des tribunaux exceptionnels, chargés de réprimer les abus commis par une partie de la noblesse, en province.

Ils aboutissent à une série d’exécutions.

Ce Gilbert d’Alègre fait partie de cette fournée macabre. Il est condamné à avoir la tête tranchée à Saint-Étienne, oui : mais c’est une exécution en effigie.

Ce qui veut dire que le condamné est absent (souvent en cavale), et que la justice de l’Ancien Régime décidait de l’exécuter symboliquement : on tuait à la place un mannequin représentant le criminel !

Les chroniqueurs racontent que Châlus assiste à sa propre exécution, de la fenêtre d’un grenier...

Entrée du château

Entrée du château | ©Cinoworus / Wikimedia Commons / CC-BY-SA

2 - Des jardins signés Le Nôtre

Ce sont véritablement les Alègre, acquéreurs de Cordès en 1659, qui transforment le château médiéval d’origine en la magnifique demeure que l'on voit aujourd'hui.

Magnifique, c'est le mot ! Promenez-vous dans ses jardins à la française, parmi la fraîcheur de ses plans d'eau et de ses buis, vous verrez…

En effet, Yves Alègre, chevalier de la Toison d'Or et maréchal de France, fait ouvrir les façades médiévales sur une grande cour, donnant sur de beaux jardins plantés d'après des plans de Le Nôtre !

Les jardins de Cordès

Les jardins de Cordès | ©Calips / Wikimedia Commons / CC-BY-SA

3 - Le suicide d'un grand capitaine

Le plus célèbre des seigneurs de Cordès s’appelle Yves d’Alègre.

Le compagnon d’armes du célèbre chevalier Bayard, « brave et vaillant capitaine » qui « fait de beaux combats au royaume de Naples et en Lombardie », dixit Brantôme.

Tiens, l’Italie, parlons-en : Yves meurt en 1512 à la bataille de Ravenne, son fils tué devant ses yeux... il se suicide littéralement en se jetant dans la mêlée !

Brantôme rapporte sur sa mort, terrible :

« Ayant vu tuer son fils Jacques, seigneur de Viveros, brave et vaillant jeune homme, devant lui, il se jette si avant dans l’épaisseur des ennemis, fut ou qu’il voulut venger sa mort, ou ne voulut plus vivre, qu’il fut tué, dont ce fut très grand dommage. »

Son corps est rapporté en France, pour être inhumé au château de Cordès, où son gisant en marbre de Carrare se trouve encore.

Pour la petite histoire, cette dalle funéraire a été redécouverte en 1946, lors de travaux au château : elle servait autrefois de marchepied à l’autel de la chapelle castrale !

Ayant été retournée, elle a ainsi été préservée de toute usure...

Le château

Le château | ©Selbymay / Wikimedia Commons / CC-BY-SA

4 - Le transfert de la bibliothèque de Strasbourg

En 1939, la bibliothèque de l’Université de Strasbourg est transférée à Clermont-Ferrand, puis au château de Cordès.

La raison ? La menace d’une invasion allemande en France !

Des Instructions sur la protection des collections des bibliothèques municipales paraissent fin septembre 1938.

Les conservateurs de bibliothèques à travers la France sont chargés d’organiser la protection de leur collection, surtout les pièces les plus précieuses.

Ainsi, des dizaines de milliers de volumes issus de la Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg partent dès août 1939 et jusqu’en mars 1940 vers la région de Clermont-Ferrand, où l’université a trouvé asile.

Parmi ces points de chute, trois châteaux, dont celui de Cordés.

Les collections retrouvent Strasbourg en 1945, dans un bâtiment qui a subi les bombardements.

Voici une photo de 1939 montrant le personnel de la bibliothèque de Strasbourg, participant à l'évacuation des collections, ici au château de Cordès...

Le transfert à Cordès

Le transfert à Cordès | ©numistral.fr - Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg

5 - Sting, an Englishman in Cordès !

En 1985, il a 34 ans. Il est le leader du groupe Police depuis 1977, il n’a pas encore entamé sa carrière solo.

Sting !

On l’a vu au cinéma dans quelques films britanniques, avant d’obtenir un rôle dans le mythique Dune de David Lynch, en 1984.

L'année suivante, il décroche le rôle principal du film américain La Promise (The Bride), celui… du baron Frankenstein !

Bon... ce long-métrage, inspiré du roman mythique de Mary Shelley, fera un flop.

Sting y partage la vedette avec Jennifer Beals, qui un an plus tôt avait brillé dans le non moins célèbre Flashdance.

Le château de Cordès a donc servi de décor extérieur au film La Promise, pour quelques scènes : une nouvelle tour est même ajoutée au château, elle prendra feu pour les besoins d’une séquence.

6 - Le Démon de midi

L’académicien Paul Bourget, écrivain opposé au naturalisme, mettant en scènes des conflits moraux au sein de la bonne société, situe l’action de son roman Le Démon de midi (1914) au château de Cordès.

Dans ce récit, notre château auvergnat prend le nom de Soléac, mais on reconnaît bien le monument :

« En se levant un peu, Savignan aperçut le château, dans une espèce de gorge soudain ouverte en vallée. Il eut le temps de bien regarder l'endroit où il allait rencontrer son ancienne fiancée. Il avait devant lui une de ces grandes maisons fortes qui proclame le travail de plusieurs générations. Le donjon carré en pierres noires remontait au 14e siècle. Deux tours plus élégantes, avec leurs toits en poivrières et leurs sommets en encorbellement, dataient de la Renaissance. Un corps de logis avait été refait au 17e siècle, à l'époque où le fils du parricide Jean de Soléac, retiré là, commandait à Le Nôtre ces charmilles dont l'ordonnance classique étonnait le regard dans ce paysage, cerné par une ligne de roches de basalte à larges et sombres cassures. Entre cette crête et le fond du vallon, foisonnaient des arbres séculaires qui prolongeaient en sauvagerie le parc où se devinait cette obsession de Versailles, un des principes de ruine de notre noblesse. »

L’histoire ? Celle de Louis Savignan, écrivain veuf, qui retrouve l’épouse de l’industriel qui soutient sa campagne à la députation en Auvergne.

Elle est... son amour de jeunesse ! Et bien sûr, ils deviennent amants.

Le but de Bourget ? Décrire « la crise sentimentale qui guette tant d'âmes, au milieu du chemin de la vie », écrit-il dans la préface.

Sources

  • Encyclopédie Châteaux Passion. Éditions Atlas, 2001.
  • André Steyert. Nouvelle histoire de Lyon et des provinces de Lyonnais. 1899.
  • Véronique Mettey. Article en ligne du quotidien La Montagne. Sting et Jennifer Beals dans un film de Franc Roddam, en 1984, au château de Cordès. 22/08/2012.
  • Jacques Cantier. Lire sous l'Occupation. CNRS Éditions, 2019.
  • Notice Dalle funéraire du tombeau d'Yves II d'Alègre. Plateforme Ouverte du Patrimoine (POP) du ministère de la Culture.

À propos de l'auteure

Vinaigrette
Passionnée par les balades et par l'Histoire, grande ou petite... pleine de détails bien croustillants, si possible !