This website requires JavaScript.

5 anecdotes sur la mort d'Anne de Bretagne au château de Blois

Quand : 9 janvier 1514

Le corps d'Anne dans la grande salle du château de Blois | Bibliothèque de Rennes / Public domain
Château Funérailles Anne de Bretagne Château de Blois

1 - Anne de Bretagne meurt de la gravelle, dans d'horribles souffrances

Anne meurt usée.

Par la vie, les chagrins.

Par la mort, qui vous arrache tout. La mort qui lui a enlevé 6 enfants, tous morts en bas-âge. Un mari, aussi, Charles VIII, le seul roi de France mort en se cognant la tête contre une porte.

Usée, à cause d’incalculables fausses-couches.

Mais c’est la gravelle qui a raison d’Anne, le 9 janvier 1514, vers 6 h du matin, dans son château de Blois.

La gravelle ? L’autre nom des calculs rénaux. Un mal que les médecins ne connaissent pas encore et sont incapables de soigner...

Anne ne se remet pas de son dernier accouchement, fin janvier 1512. Encore un fils mort-né...

Des douleurs insupportables aux reins la réveillent la nuit.

Une fièvre violente brûlante comme l’enfer, une urine sanguinolente ne la quittent plus...

Anne souffre 10 jours. 10 jours de cauchemar intense.

Imaginez... une douleur intolérable, vous savez ? Celle qui n’arrive même pas à vous assommer.

Et dans la pâleur cendrée du matin du 9 janvier, tout est fini.

2 - Pourquoi il vaut mieux mourir en hiver

Habituellement, après leur mort, les corps des rois et reines de France se font exposer sur un lit de parade, pendant plusieurs semaines. Pour recevoir les hommages du gratin, tout ça...

Mais avec la chaleur des torches, le corps se décompose vite. Je ne vous parle pas de l’odeur !

On invente alors la coutume de l’effigie, dès la mort d'Henri IV, en 1610. Sorte de mannequin avec visage et mains en cire, moulés d’après ceux du défunt.

Ainsi, pendant plusieurs jours, la cour pouvait défiler sans être incommodée par l’odeur.

Mais pour Anne, point de relent immonde !

Un chroniqueur de l’époque rapporte que c’est un miracle : on l'expose 9 jours entiers sans qu'elle dégage une seule odeur...

Bon, vous avez compris : de miracle, que nenni.

Disons que quand on mourait en janvier, vu la température glaciale qui régnait dans un château du 16e siècle, les corps se conservaient bien mieux...

3 - Le dilaceratio corporis : un corps à Saint-Denis, un cœur à Nantes

Depuis l’Antiquité, on embaume les rois de France.

Puis, tout change avec la mort de Philippe III le Hardi, le roi bouilli à Perpignan. Pour une question de transport et d'hygiène...

On se met à pratiquer la partition du corps (dilaceratio corporis) : la division du corps en cœur, entrailles, chairs et os, avec des sépultures multiples.

Pour Anne, son tombeau principal se trouve à Saint-Denis, nécropole des rois de France, près de Paris.

Son petit cœur, lui, se trouve à Nantes dans son écrin doré, exposé aujourd’hui au musée Thomas-Dobrée.

Le corps d'Anne de Bretagne déposé dans le cercueil

Le corps d'Anne de Bretagne déposé dans le cercueil | ©Bibliothèque de Rennes / Public domain

4 - Des funérailles à rallonges

40 jours ! Anne de Bretagne lance une mode

Renâclements des montures. Tintements des mors.

Et les pleurs. Les pleurs couvrant tout, le cahot des roues, le vent dans les branches... la France entière, venue en cortège suivre le char funèbre, pleure sa reine et sa duchesse !

40 jours de funérailles. Du jamais vu !

Le veuf, Louis XII, a le cœur brisé : il veut que la disparition d’Anne marque les esprits.

Rappeler que la Bretagne fait partie de la France...

Toute la cour de France suit le cortège funèbre. Parti de Blois, celui-ci fait lentement route vers Paris. Puis Saint-Denis.

Les funérailles de 40 jours d'Anne lancent une mode : on ne fera plus autrement jusqu'à Louis XIV.

Après ce dernier, pour les 2 rois restants... hem ! On enterrera fissa le corps de Louis XV, mort de la petite vérole à Versailles, et pour Louis XVI, guillotiné, hé bien... on ne se pose pas la question !

La reine endormie

Tout avait commencé par une grande chambre pleine de froufrous de vêtements.

Odeur de braises tièdes. Pétillements du bois dans la gueule noire de la cheminée.

Un jour glacé qui glisse par la fenêtre.

Voilà la grande chambre du château de Blois. Regardez : le corps embaumé d’Anne va rester là une semaine, veillé par des moines marmonnant la messe des morts.

Sur quoi on la transfère dans la grande salle d’honneur, le corps couvert de lourdes hermines, sceptre et couronne en mains, allongée sur un lit de drap d’or de « 36 aulnes » (41 mètres !).

Les seigneurs passent rendre les derniers hommages. Impressionnés, car Anne paraît juste... endormie. Son visage... si paisible, si beau !

Après quoi on ferme le cercueil « en bois de cèdre couvert de lames de cuivre. »

Et après un passage par l’église Saint-Sauveur de Blois : direction Paris, dans un char tiré par 6 grands chevaux couverts de velours noir...

Sur le chemin, les petites gens pleurent. Devant chaque maison, la flamme fragile d'une bougie.

Jusqu’aux tous derniers mots qui clôturent le rituel, à Saint-Denis : « La reine est morte ». 3 fois.

5 - Les funérailles comme si vous y étiez... avec un requiem à vous coller la chair de poule

On sait quelle musique a été jouée tout le long des funérailles d’Anne de Bretagne : il s’agit du requiem composé par Antoine de Févin, le musicien attitré (et préféré) de Louis XII.

Un roi qui ne manque pas d'envoyer les partitions à toutes les cours européennes !

Je vous l'avais dit : Anne a eu droit a des funérailles hors normes...

N.B. : La bibliothèque de Rennes met à disposition les enluminures tirées du Récit des funérailles d'Anne de Bretagne, de Pierre Choque, héraut d'armes d'Anne. Parfait pour compléter la lecture de l'article !

Source

  • Pierre Choque. Récit des funérailles d'Anne de Bretagne. 1858.

À propos de l'auteure

Vinaigrette
Passionnée par les balades et par l'Histoire, grande ou petite... pleine de détails bien croustillants, si possible !