Il y a des monuments aux morts qui ne ressemblent à aucun autres. Par leur forme inhabituelle, par leur sujet. Parce que ce sont de véritables œuvres d'art, aussi, signées par de grands artistes. C'est le cas de l'étonnant monument de Capoulet-et-Junac dans l'Ariège, dédié aux morts de la guerre 1914-1918. On le doit au célèbre sculpteur Antoine Bourdelle (1861-1929).
Trois visages, trois terribles expressions qui se découpent sur le ciel. Trois têtes que l'on dirait tranchées, pour crier l'horreur de la guerre : elles représentent l'Épouvante héroïque, la Souffrance et la Mort, selon les propres mots du maire de Capoulet-et-Junac, M. Voivenel, à l'origine du monument.
À la base exposée en 1899 sous le titre Les Figures hurlantes, ces trois pièces ont été réalisées pour le projet du monument aux morts de Montauban, dédié aux victimes de la guerre de 1870. Elles ne sont finalement pas incluses dans la sculpture. Il faut attendre 1935 pour qu'elles sortent de l'oubli.
Le maire de Capoulet-et-Junac, M. Voivenel, docteur et ancien combattant de la Grande Guerre, se rend à Paris demander à la veuve de son ami Bourdelle la permission de reproduire une de ses oeuvres, pour le monument aux morts de sa petite commune ariégeoise. Il tombe en pâmoison devant les trois impressionnantes têtes et souhaite les acheter... Mieux que ça : Mme Bourdelle les lui donne !
Le monument aux morts est inauguré le 17 novembre 1935, en présence du vieux maréchal Philippe Pétain (80 ans), du préfet de l'Ariège et d'une foule très nombreuse. La cérémonie fait même l'objet d'une radiodiffusion, dans toute la France !
Sources
Patrick RoquesCapoulet-et-Junac : monument aux morts de la guerre 1914-1918Région Midi-Pyrénées, Direction de la Culture et de l’Audiovisuel, service Connaissance du Patrimoine, 2013 [PDF en ligne]