1392. Alors qu'il rentre à son hôtel, Olivier de Clisson manque de se faire tuer

L'hôtel de ClissonL'hôtel de Clisson | ©Anecdotrip.com / CC-BY-NC-SA

Le violent traumatisme

Il y avait eu une grande fête, à la cour du roi Charles VI, dans son hôtel parisien de Saint-Pol. Toute la soirée, à l’occasion de la Fête-Dieu, on avait bu, baffré... Les derniers invités partent titubant, vers 1 heure du matin. Olivier de Clisson en fait partie. Olivier.


Il a 7 ans lorsqu’il voit son paternel se faire exécuter, pour rien, par le roi de France Philippe VI... Accusé de trahison. Sa mère, Jeanne de Belleville, devient comme folle : on la verra au château de Clisson préparer ses raids sanglants de vengeance contre les Français de la région...


Exilé, élevé en Angleterre, le petit Olivier ne ressent qu’un fort sentiment de haine et de vengeance au plus profond de ses tripes. Mais quand il revient en France, on est en pleine guerre de Cent Ans.


Après avoir fait partie du camp anglais, il rejoint le parti du roi de France Charles VI et combat avec du Guesclin. La consécration de ce seigneur breton surpuissant : le roi le fait connétable de France, en 1380.

L'agression, la nuit...

Et le voilà, à 1 heure du matin, de retour de nouba. Brinquebalé par le pas tranquille de sa monture. Quelques amis l’accompagnent avec des torches dans les petites rues désertes qui le mènent jusqu’à son hôtel du Marais.


Mais au coin de la rue Culture-Sainte-Catherine, une grosse voix rauque se met à hurler : « À mort Clisson, à mort !! » Avant d’avoir pu faire quoi que ce soit, Olivier et ses amis se font complètement encercler. Par 40 types, sinistres !


Aussitôt, les hommes de Pierre de Craon (car c’est lui, le vil agresseur) se ruent sur lui, le tabassent. Olivier tombe lourdement de sa selle. Un coup plus fort le frappe à la tête et il tombe par terre, groggy. Craon, voyant la large tache de sang qui s’étale sous le corps inerte, croit qu’il est mort, et se sauve.

Flaque de sang et roi dingo

La rumeur d’une tentative de meurtre ne tarde pas à arriver aux esgourdes du roi. Charles, qui allait se coucher, commence à s’agiter. Il « se vêtit d’une houppelande, on lui boutât les souliers aux pieds et il courut à l’endroit où on disait que son connétable venait d’être occis », dit Sainte-Foix.


Charles trouve Olivier salement amoché. Allongé dans la boutique d’un modeste boulanger qui avait eu la bonne idée de se trouver là à faire son pain pour le matin suivant...


Charles est impressionné par l’énorme flaque de sang dans laquelle Olivier baigne. Il lui demande qui lui a fait ça. Au nom de Pierre de Craon, Charles bondit et jure qu’il va payer.





Craon, lui, se cachait chez le duc de Bretagne, au château de Suscinio, vous vous souvenez ? Auprès du duc Jean IV, oui... qui aurait commandité le meurtre d’Olivier. Car Jean a une dent contre Olivier.


C’est la guerre de Succession bretonne. Causée par la mort sans descendance du duc Jean III. D’où une guéguerre pour la couronne ducale, avec 2 clans en lice : Jean de Montfort allié aux anglo-bretons, Charles de Blois et les franco-bretons. Le vainqueur, après une guerre acharnée ? Jean de Montfort… Jean IV ! Une victoire qui n’aurait pas pu se faire sans son grand ami Olivier.


Mais quand Olivier change de camp et passe à l’ennemi, chez le roi de France, il devient un trop grand rival. Jean cherche à le tuer : ça se passe au château de l’Hermine, à Vannes. Les deux finiront par se réconcilier… Bref ! Charles VI ordonne à Jean IV de lui livrer Craon. Refus, vous pensez !


Le roi prend la tête d’une armée, direction la Bretagne. Il n’y arrivera jamais, le pauvre Charles est frappé par sa première crise de démence dans la foret du Mans. La première d’une longue série qui lui vaudra son surnom de Fol...

Sources

  • Georges Bonnefons. Les hôtels historiques de Paris. 1852.
  • Eugène de Ménorval. Paris depuis ses origines jusqu'à nos jours (tome 2).1892.